Nous faisons face à des crises géopolitiques, économiques, et des crises au sens large qui impactent fortement nos entreprises et nos structures. Ces périodes difficiles exigent de savoir les affronter. Cet article a donc pour vocation de vous partager des conseils pour manager des missions de crise.
Le management de transition représente effectivement une solution complète pour gérer ces crises.
Replay du webinaire sur la gestion des missions de crises
Le 18 novembre dernier, nous étions nombreux à nous connecter pour aborder un sujet qui, bien que rarement désiré, est on ne peut plus d’actualité : comment manager une mission de crise. Ce présent article s’appuie ainsi sur ce webinaire pour vous partager ces conseils !
Le webinaire a fait intervenir 3 managers de transition expérimentés et notre Directeur de Mission.
Si vous souhaitez revoir ce webinaire, le voici en replay :
Qu’est-ce qu’une crise en entreprise ?
Tout d’abord, comment définir une crise en entreprise ?
En effet, pour affronter une crise, il faut déjà pouvoir l’identifier. Selon l’experte Pascale Valerdi, une crise est généralement la manifestation soudaine et violente ou l’aggravation brusque d’un état latent.
Ramenée à l’entreprise, il s’agit d’un événement ou une accumulation d’événements qui perturbe le cours normal de l’activité. Elle plonge alors l’organisation et ses collaborateurs dans un climat de forte incertitude.
Ces crises peuvent être internes (endogènes) ou externes (exogènes), et il peut y en avoir plusieurs simultanément, ce que l’on nomme une « polycrise ». Jean-Pierre Michot précise qu’une crise constitue un élément brutal, inattendu, auquel l’entreprise ne peut faire face, faute de moyens ou de ressources disponibles.

Quels sont les signaux d’alerte des missions de crise ?
Les signaux peuvent être subtils ou brutaux. Jean-Pierre Michot évoque des cas extrêmes comme un DG envoyé en prison, ou plus insidieux comme l’absentéisme d’employés clés, des téléphones qui ne sonnent plus, ou des fournisseurs et clients qui ne contactent plus la société.
Frédéric Tissot illustre cette diversité avec des exemples vécus :
- une crise externe comme la crise sanitaire du Covid ;
- une crise de défaillance due à un problème de santé (un dirigeant victime d’un AVC) ;
- ou une crise interne de suspicion de malversation nécessitant la séparation immédiate de la direction générale, financière et technique.
Pascale Valerdi souligne, elle, qu’il ne faut pas négliger les premiers signaux faibles. Par exemple :
- un pourcentage d’absentéisme important,
- l’obsolescence des compétences due à la digitalisation accélérée,
- ou un service qualité débordé de réclamations.
Pour David Guitton, même une baisse de forme ou une démotivation légère au niveau d’un CODIRE peut être le début d’une crise. En effet, l’équipe de direction doit fonctionner comme un « commando » solidaire pour transcender les moments difficiles.

Quelles sont les qualités et compétences essentielles pour manager une mission de crise ?
Gérer des crises exige un profil et un tempérament particuliers.
Selon Frédéric Tissot, la qualité première nécessaire est l’écoute, car l’humain est la première ressource de l’entreprise. Il faut donc dialoguer, se connecter avec les équipes, et trouver la bonne distance avec des salariés parfois démotivés, déboussolés ou trahis.
Pascale Valerdi insiste sur la force personnelle. Cette capacité, distincte d’une forte personnalité, permet de conserver de la distance et de l’authenticité, assurant ainsi une certaine résistance et performance sur la durée, même si la mission s’allonge bien au-delà des prévisions.
Jean-Pierre Michot complète en évoquant la nécessité d’être surqualifié techniquement pour le poste. Il faut également avoir des qualités relationnelles fortes pour motiver les équipes, mais aussi pour faire monter « dans le bateau » les pouvoirs publics, les syndicats, et le client lui-même. Il faut enfin avoir le « cuir tané » et être résilient.
David Guitton rappelle que cette force nécessite d’être régénérée. Il est crucial d’avoir dans son entourage des personnes de qualité, comme des confrères, un réseau spécialisé (tel qu’Amadeus Executives), ou un directeur de mission, qui peuvent entendre le stress et la souffrance, aider à illustrer des situations complexes, et régénérer l’énergie et le courage.

Comment le manager de transition gère-t-il la solitude inhérente à cette mission ?
La solitude est inhérente à la position du décideur. Le manager de transition se considère souvent un « saltimbanque » qui part à la semaine, et il encaisse beaucoup.
Pascale Valerdi explique qu’il faut savoir « décaisser » la tension accumulée par le sport, la parole, les amis ou la famille. Il est essentiel de trouver le relais qui apaise en dehors de l’entreprise. Elle insiste également sur le soutien offert par les groupements de managers de transition, qui agissent comme un réseau d’amis et de confidents.
Jean-Pierre Michot confirme l’importance de parler et de se vider avec des gens qui connaissent et comprennent les « galères » vécues, les mensonges et les vacheries rencontrées. Ce partage d’expériences permet de décharger l’attention mentale.
Frédéric Tissot, en plus de s’appuyer sur son réseau pour les renforts techniques, fait le point régulièrement avec son directeur de mission. Être à plusieurs signifie souvent plus intelligent que seul pour challenger ses idées.
Le rôle du directeur de mission, comme David Guitton, est d’être un confident, un « sparing partner », assurant un rôle de fluidification, de coaching, et de renfort humain et technique durant les périodes intenses.

Quelle posture adopter pour mobiliser les équipes dans un contexte de crise et d’incertitude ?
Le manager de transition doit immédiatement rassurer et motiver.
Jean-Pierre Michot conseille d’apparaître sûr de soi et de réagir aux surprises avec le sourire. Sa posture est celle du « vieux qui rassure », mais aussi du « chef qui motive », apportant de la bonne humeur et du dynamisme. Face aux équipes en vrac et ayant peur, il faut être le phare qui éclaire et pas celui qui éblouit.
Selon lui, il faut :
- éclairer le chemin,
- ne jamais mentir,
- ne rien promettre,
- mais expliquer comment les étapes vont se dérouler,
- et donner ainsi courage aux gens.
Pour Pascale Valerdi, la première posture est le leadership. Les crises sont le test ultime face à l’imprévisible. Il faut inspirer confiance, croire en soi, tout en gardant un équilibre subtil entre l’ego et l’humilité.
La mobilisation passe aussi par l’exemplarité : il faut être bon dans ce que l’on fait, car les équipes remarquent si le manager hésite ou ne sait pas. Il faut également descendre de la « tour d’ivoire » pour voir les équipes à tous les étages.
Frédéric Tissot utilise le mantra : « Je dis ce que je fais, je fais ce que je dis ». Il privilégie alors une communication claire, une posture de curiosité, et l’exemplarité.

Quelle est l’importance du réseau et des acteurs externes en mission de crise ?
Le réseau est fondamental et couvre plusieurs dimensions.
Jean-Pierre Michot souligne l’importance de connaître le milieu socio-professionnel externe, incluant les acteurs publics. Lorsque des portes sont closes ou des problèmes techniques insolubles surgissent, le réseau d’amis, d’anciens collègues, ou le directeur de mission peuvent apporter un éclairage nouveau.
Le réseau peut même jouer un rôle dans l’obtention d’une mission (exemple d’une recommandation par un représentant syndical).
Frédéric Tissot insiste sur le réseau issu de la carrière professionnelle, mais aussi sur la nécessité de fréquenter les institutions locales, les élus, les fournisseurs, et les acteurs locaux pour obtenir de l’aide et des ressources financières.
Pascale Valerdi explique qu’elle utilise aussi son réseau personnel pour pallier les blocages qui surviennent lorsque la société est en difficulté (comme en redressement judiciaire) et que les acteurs institutionnels refusent de suivre. Ce réseau de confiance peut aider à contourner certaines difficultés, comme obtenir une entrée auprès de l’administration publique.

Comment préparer la passation et le relais après la phase de redressement ?
La fin de mission est une étape cruciale qui doit être planifiée.
Pour Frédéric Tissot, la passation de relais s’envisage dès le début de la mission. Le diagnostic initial et le plan d’action serviront de rapport de fin de mission. Ensemble, ils tracent l’historique de ce qui a été fait. Ceci fournit d’ailleurs au successeur le maximum d’informations pour assurer la continuité de l’action.
Jean-Pierre Michot raconte que le manager de transition représente la mauvaise histoire, l’histoire d’avant. Son rôle n’est pas de satisfaire son ego, mais de pour laisser une structure en parfait état. La passation doit donc être symbolique et sans ambiguïté. L’ancien manager de transition remet les clés et s’efface pour que le nouveau puisse immédiatement prendre la lumière et la responsabilité.
Pascale Valerdi rappelle qu’un manager de transition ne doit pas chercher à faire un CDI. Il faut savoir partir ! D’autant plus qu’il risque d’être moins bon si la fatigue s’installe. Au moment du départ, il est essentiel de faire le nécessaire pour dire au revoir aux équipes. Aussi il faut avoir l’humilité de mettre le successeur en avant.
David Guitton souligne que, souvent, les compétences mobilisées en gestion de crise diffèrent de celles nécessaires pour le pilotage au long cours et le développement classique. C’est pourquoi les cabinets d’accompagnement sont souvent mandatés pour recruter le titulaire en CDI, un profil qui viendra piloter l’entreprise une fois la situation assainie.

Conclusion des conseils pour manager les missions de crise
La gestion de crise pour un Manager de Transition ressemble à la navigation en haute mer : vous êtes seul à la barre, mais vous ne pouvez survivre qu’en vous appuyant sur votre équipage, en utilisant vos cartes (le réseau) et en sachant quand passer le relais à un capitaine frais pour la traversée à venir.
Reste aux entreprises de trouver le bon manager. Et aux managers d’être bien accompagnés pour trouver les bonnes missions. N’hésitez donc pas à nous contacter pour parler de vos projets !